Ici c’est la neige. Là-bas c’est la poussière.
Ici c’est la poussière. Là-bas c’est la neige.
Et l’océan n’est nulle part.
La dernière fois, je me suis dit que j’allais rester au milieu. Entre la neige et la poussière. Le milieu, en l’occurrence, c’est Casablanca. 20 degrés, du soleil, un ciel bleu et la piscine de l’hôtel de transit de la zone aéroportuaire de Casa.
Le service de l’hôtel est pourri, leur bouffe aussi, mais la piscine est belle, le climat idéal, sans poussière, sans neige. Quand je passe là bas, surtout en décembre ou janvier, ca devient presque irréaliste. C’est passer du grand froid à l’harmattan avec au milieu quelques heures de climat idyllique. Mais voilà, je ne reste jamais. La pratique est toujours différente de la théorie.
En théorie, le milieu entre la neige et la poussière devrait donner un pays où il tomberait de la neige brune. Une sorte de mélange des deux. On ferait des bonhommes de neige bruns. Vous imaginez, ce serait le premier pays où l’on aurait des bonhommes de neige métis. Le premier pays où même la météo respecterait la représentation des minorités visibles dans son quotidien.
En théorie aussi, cela réglerait le problème du chez moi. Car entre ici et là bas, c’est devenu compliqué. On me demande des fois de but en blanc : « Chez toi c’est comment? ». « Chez moi, où?? ». Quand on se lance à demander innocemment ce genre de chose à quelqu’un, il faut mieux avoir posé le contexte d’abord. Peut-être la personne en face n’a pas de chez elle. Peut-être elle en a plusieurs. Après tout il n’y a aucun texte de loi qui réglemente le nombre de chez soi. Si je résume, deux Ici, deux Là-bas, sans compter qu’il y a le troisième Là-bas, celui ou il y a l’océan. Je ne suis pas sûre de combien de chez soi cela donne, tout cela. Cinq éléments, pas encore de quatrième dimension, un nombre indéfini de chez soi. Trois lieux.
Julie Louvel
Texte écrit dans le cadre de l’atelier DeGama « Entre littérature, écriture & culture » animé par Papy Maurice Mbwiti (20/02/18).